Pologne/Biélorussie – À l’heure où les relations entre Varsovie et Minsk ne sont pour le moins pas au beau fixe, notamment depuis que la Pologne – comme l’Union européenne dans son ensemble – a pris fait et cause pour l’opposition biélorusse contestant avec force la réélection du président Loukachenko qu’elle accuse de fraudes massives, et au lendemain même de la décision de l’homme fort de Minsk d’instituer le 17 septembre comme fête nationale biélorusse – commémorant ainsi le 17 septembre 1939, jour de la « libération » de l’ouest de la Biélorussie jusqu’alors occupé par la Pologne, selon Minsk, ou l’invasion et l’annexion de l’est de la Pologne, selon Varsovie –, le président polonais Andrzej Duda a choisi de prendre le contre-pied par un geste historique de réconciliation entre les deux peuples frères – qu’une longue histoire commune rassemble et divise – en rendant hommage aux Biélorusses tués par des partisans polonais peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Commémoration de la « réunification de la nation biélorusse »
Cette semaine avait en effet débuté par ce qu’on pourrait qualifier de provocation de la part des autorités de Minsk vis-à-vis de Varsovie. Ce lundi 7 juin, le régime d’Alexander Loukachenko a très officiellement institué le 17 septembre – jour anniversaire de l’invasion de la Pologne par l’Union soviétique en vertu du pacte Molotov-Ribbentrop – baptisé désormais « Journée de l’unité nationale » et symbolisant
« le rétablissement de la justice historique et la réunification de la nation biélorusse qui a été divisée de force en 1921 conformément au traité de Riga »,
explique le communiqué de l’administration présidentielle biélorusse, « l’établissement de [ce jour férié mettant] en évidence la continuité des générations, la stabilité et l’autosuffisance de la nation et de l’État biélorusses […] la réunification de la nation biélorusse en 1939 a aidé le pays à triompher dans la Grande Guerre patriotique [Seconde Guerre mondiale, ndlr.], [et] à prendre la place qui lui revient dans la communauté internationale », une vision de l’Histoire fortement inspirée du narratif soviétique qui expliquait cet événement par la nécessité de protéger « les frères et sœurs de l’ouest de l’Ukraine et de l’ouest de la Biélorussie » et que la Russie a également conservé, condamnant toute évocation du Pacte germano-soviétique comme une tentative de « réhabilitation du nazisme ».
Hommage à 79 Biélorusses tués par des partisans polonais
Le lendemain de ce geste fort du gouvernement biélorusse, dont on peut imaginer qu’il n’a pas contribué à améliorer les relations avec la Pologne, le président polonais a, au contraire, choisi d’effectuer un geste historique allant dans le sens d’une réconciliation durable entre les nations polonaise et biélorusse. Ce mardi 8 juin donc, Andrzej Duda s’est rendu dans le petit village biélorusse de Zaleszany (Залешаны, 65 hab.), situé au sud de la voïvodie de Podlachie, à une dizaine de kilomètres de la frontière avec la Biélorussie, pour y déposer une couronne de fleurs devant un monument dédié aux 79 civils biélorusses tués par des membres de l’Union militaire nationale (Narodowe Zjednoczenie Wojskowe, NZW), un mouvement de résistance polonais contre l’invasion soviétique.
« Zaleszany est un lieu marqué par la souffrance et la mort de Biélorusses vivant dans la République [polonaise …] Des gens – des femmes et des enfants innocents – sont morts ici »,
a déclaré le président Duda, évoquant le fait que la Podlachie abrite historiquement plusieurs communautés ethniques (Polonais, Biélorusses, Juifs et Tatars musulmans).
« Malheureusement, de nombreuses activités sont menées pour diviser nos nations, et pourtant… malgré [nos] différences, nous constituons une communauté et c’est ce que je voulais exprimer avec ma présence en Podlachie ».