Pologne – « J’ai décidé de prendre des mesures qui permettront de renforcer la sécurité à la frontière avec l’oblast de Kaliningrad. Nous allons commencer la construction d’une barrière temporaire pour renforcer la sécurité de la frontière », a annoncé le ministre de la Défense polonais Mariusz Błaszczak le 2 novembre dernier.
Les autorités polonaises ont en effet de bonnes raisons de craindre une répétition de l’opération menée depuis la Biélorussie l’année dernière, quand le régime de Loukachenko a fait venir du Moyen-Orient des dizaines de milliers de candidats à l’émigration illégale vers l’Europe en mettant en place des liaisons aériennes directes et en leur faisant miroiter la possibilité de traverser facilement la frontière terrestre entre la Biélorussie et la Lituanie ou la Pologne pour entrer dans l’espace Schengen.
Pour Varsovie comme pour Vilnius, il a toujours été clair que cette opération qualifiée de « guerre hybride » avait été commanditée depuis Moscou. C’est pourquoi, quand le président russe Vladimir Poutine a ordonné en septembre, lors d’une réunion gouvernementale consacrée au tourisme, de supprimer l’obligation de visas de tourisme pour tous les pays non répertoriés dans la liste des pays jugés hostiles à la Russie – et donc pour la plupart des pays d’Afrique et du Moyen-Orient – sans nécessité de réciprocité, à Varsovie, on a tout de suite pensé que l’opération biélorusse de l’année dernière pouvait se répéter.
Ce soupçon est devenu plus fort encore lorsque le gouverneur de Kaliningrad, Anton Alikhanov, a ensuite demandé à l’autorité russe du transport aérien, Rosaviatsia, d’autoriser l’atterrissage à Kaliningrad d’avions de pays tiers réalisant des liaisons entre aéroports qui ne sont pas leur aéroport d’origine. Dans un entretien pour le journal Izvestia, le même gouverneur a ensuite signalé que 400 places avaient été préparées à Kaliningrad pour les réfugiés de Kherson, la ville des bords du Dniepr occupée par les forces russes qui est aujourd’hui la cible d’une contre-offensive de la part des forces ukrainiennes.
Même si aucun réfugié n’est encore arrivé d’Ukraine, Varsovie craint de voir arriver à sa frontière avec Kaliningrad un afflux de réfugiés ukrainiens auxquels pourraient se mélanger des « touristes » venus en masse d’Afrique et du Moyen-Orient. Aux yeux de la Pologne, que la Russie cherche à provoquer une nouvelle vague de réfugiés ukrainiens ne semble en effet faire aucun doute aujourd’hui, considérant les bombardements visant depuis plusieurs semaines les infrastructures énergétiques civiles tandis qu’approche l’hiver.
C’est donc pour éviter l’arrivée massive d’immigrants économiques africains et moyen-orientaux au milieu de ces réfugiés de guerre ukrainiens que la Pologne a décidé de construire sur ses quelque 200 km de frontière avec l’enclave russe de Kaliningrad une clôture similaire à celle mise en place cette année à la frontière avec la Biélorussie.
Pour le moment, les unités du génie de l’armée polonaise sont déjà en train d’installer une triple clôture provisoire de barbelés sur 3 m de large et 2,5 m de haut avant la mise en place des moyens de surveillance électroniques comme à la frontière avec la Biélorussie.