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Procédure de sanction initiée contre la Pologne : l’UE en crise

Temps de lecture : 4 minutes

Union européenne – Mercredi 15 novembre, le Parlement européen a adopté une résolution qui se veut la première étape d’une procédure de sanction contre la Pologne. Mais de nombreuses voix s’élèvent contre ce vote qui détourne les pouvoirs des institutions de l’UE à des fins politiques, mettant ainsi en danger l’Union européenne.

À 432 voix pour, 142 contre et 71 abstentions, le Parlement européen a voté mercredi 15 novembre une résolution très critique envers la Pologne et son gouvernement conservateur. La Pologne a été mise en cause par les libéraux, la gauche radicale et européistes. Des attaques lancées notamment par MM. Timmermans (vice-président de la Commission européenne, chargé de l’Amélioration de la législation, des Relations inter-institutionnelles, de l’État de droit et de la Charte des droits fondamentaux), Weber (député allemand qui préside le groupe Parti populaire européen) ou encore Verhofstadt (ancien Premier ministre belge et député belge présidant le groupe ADLE).

Pour justifier leur mise en cause de la Pologne, les soutiens de la résolution déclarent que les réformes de la justice entreprises par le PiS (Parti Droit et Justice) au pouvoir depuis 2015 menacent l’État de droit. Mais ce n’est pas tout. Le Parlement européen s’attaque également à l’attitude de la Pologne envers l’avortement. Le Parlement européen a appelé la Pologne à ne pas restreindre l’accès aux avortements eugéniques, bien que les États membres soient selon les traités en vigueur, libres de choisir sur ce sujet.

Tout cela se passe dans un contexte tendu du fait des attaques à l’unisson des médias occidentaux contre la Pologne, se faisant systématiquement le relais du point de vue d’une opposition organisée et soutenue notamment par les réseaux Soros, et connectés à la gauche radicale. L’affaire de la forêt de Białowieża, où le gouvernement tente d’endiguer une invasion de coléoptères par l’abattage d’arbres dans une forêt protégée, ou encore la marche patriotique du 11 novembre décriée comme une « marche nazie », ou « fasciste », voire « de suprémacistes blancs », sont les deux principaux sujets sur lesquels la presse occidentale a concentré ses tirs. Seulement, bon nombre de députés européens occidentaux se basent sur ces sources partielles et partiales pour décider.

La procédure qui mène à terme à enclencher l’article 7 du Traité de l’UE – suspendant son droit de vote au Conseil – a donc été démarrée.

L’Allemagne et la France envisagent également de conditionner l’accès à des fonds européens, et se préparent pour les débats du printemps 2018 sur la distribution des fonds pour 2020-2026. Selon Le Monde, un des scénarios envisagé par Paris et Berlin prévoit une baisse de 30% des montants alloués à la politique de cohésion.

Durcissement de l’opposition entre deux blocs

Pour le polonais Ryszard Legutko, député européen du PiS, « ce n’est pas une question d’État de droit ou de valeurs, c’est une question de pouvoir (…). Quelques heures après l’annonce de projets de loi sur l’institution judiciaire [polonaise], M. Weber lançait déjà avec d’autres députés une campagne anti-polonaise. Pourtant M. Weber ne parle pas le polonais, il ne connaissait pas le contenu de ces lois, il n’avait aucune expertise en main (…) mais il savait déjà tout et lançait cette nouvelle croisade contre le gouvernement polonais. Les socialistes et les libéraux ont fait la même chose. (…) Ce sont de vieilles habitudes coloniales : voici que cette Europe de l’Est ose faire quelque chose, qu’elle ose décider pour elle-même ! (…) Toutes les actions de la Commission contre la Pologne sont contraires au droit et violent les traités européens. Que ces actions soient approuvées ici au Parlement ne les rend pas moins contraires au droit. Vous avez ici la majorité, vous pouvez tout voter. Vous pouvez même voter que deux plus deux font cinq ! »

Dans sa lettre ouverte à M. Timmermans, Marek Jurek avait souligné ces abus de la part des cadres supérieurs de l’UE et avait averti contre le danger de ces abus de pouvoir. Appelé par notre correspondant en Pologne Olivier Bault pour Réinformation TV, Marek Jurek a ajouté que « si une majorité de gouvernements nationaux choisissent, au sein du Conseil, de fermer les yeux sur les abus de la Commission, c’est que nous sommes en train de nous éloigner de manière radicale de l’État de droit au niveau des institutions européennes. (…) Cela arrange certains pays de voir la Commission pacifier les États d’Europe centrale et orientale. »

La Tchéquie avait annoncé par l’intermédiaire de son Secrétaire d’État aux Affaires européennes Aleš Chmelař le 7 septembre dernier qu’elle n’était pas favorable à l’application de l’article 7 contre la Pologne. Selon M. Chmelař, l’engagement des institutions européennes du côté de certains opposants à la réforme de la justice polonaise, qui devrait rester une question interne, rappelle-t-il, serait inapproprié et contre-productif, créant l’impression d’un traitement paternaliste. »

Côté hongrois, le Premier ministre Viktor Orbán a reçu l’aval du gouvernement pour appliquer le veto de la Hongrie si l’article 7 venait à être enclenché contre la Pologne, désamorçant ainsi la stratégie annoncée par M. Timmermans. Le Vice-Premier ministre hongrois Zsolt Semjén a qualifié la résolution de mercredi de « honteuse et scandaleuse. »

En conclusion du débat sur la Pologne précédant le vote, alors que l’hémicycle était presque vide, M. Legutko a ajouté lapidairement que « cela ne nuit pas à la Pologne, cela nuit à l’Union européenne. Si l’on devait rassembler toutes les diatribes anti-UE entendues dans cette chambre, elles ont moins nui à l’image de l’UE que votre intervention. Pour détruire l’image de l’UE, vous avez fait plus que Marine Le Pen et Nigel Farage pris ensemble. »