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Tristan Azbej : « La chrétienté est la foi la plus persécutée du monde »

Temps de lecture : 12 minutes

Entretien avec Tristan Azbej, secrétaire d’État hongrois responsable de l’aide aux chrétiens persécutés et du programme gouvernemental Hungary Helps : « Nous nous heurtons au fait, passé malheureusement sous silence, que la chrétienté est la foi la plus persécutée du monde ».

Hongrie – En 2016, le gouvernement hongrois a mis en place un secrétariat d’État destiné à venir en aide aux chrétiens persécutés. La motivation de cette mesure unique au monde s’explique principalement par deux facteurs : premièrement, la mise en place d’une stratégie d’exportation de l’aide là où le besoin existe, par opposition à la politique occidentale immigrationniste, et deuxièmement, la mise en pratique de la redéfinition effectuée par Viktor Orbán, le Premier ministre hongrois, du concept de démocratie chrétienne. En 2017, le gouvernement lance le programme Hungary Helps, destiné à porter l’aide du gouvernement hongrois, axé sur trois thématiques principales : aide humanitaire, migration, liberté de culte. En 2018, le parlement valide ce programme et en septembre de la même année, Tristan Azbej devient secrétaire d’État en charge de l’aide aux chrétiens persécutés et du programme Hungary Helps.

Un entretien mené à Budapest, par Ferenc Almássy.

 

Ferenc Almássy et Tristan Azbej. Photo : Visegrád Post

Ferenc Almássy : Nous vous remercions d’avoir accepté cet entretien. Nos lecteurs sont principalement étrangers et le fait qu’un gouvernement possède un tel secrétariat d’État qui s’occupe clairement et ouvertement des chrétiens surtout est intéressant pour les Occidentaux. Pour les Français, cela peut même être incompréhensible en raison de la laïcité qui existe en France. Dans l’Europe moderne du XXIe siècle, où le laïcisme augmente de plus en plus, comment se fait-il que la Hongrie ait décidé d’avoir un secrétariat d’État expressément chargé des chrétiens persécutés ?

Tristan Azbej : La Hongrie est un pays chrétien et nous sommes un gouvernement chrétien-démocrate. Les Hongrois nous ont confiés trois fois de suite la majorité parlementaire des deux tiers pour représenter ce credo. Nous ne contredisons pas le principe de sécularité car il n’y a pas de religion d’État en Hongrie – contrairement à plusieurs autres pays de l’UE –, le gouvernement ne souhaite pas s’immiscer dans la foi, dans la relation entre l’Homme et Dieu. Les traditions et la société de la Hongrie, toute son identité nationale reposent sur des principes de société et une éthique chrétienne, conjugués d’ailleurs au droit romain et à la philosophie grecque. Quand nous recevons des critiques de la part de ceux qui suivent le principe de laïcité de façon très stricte, nous répondons qu’en Hongrie, l’État et l’Église sont séparés mais pas divisés – la coopération est très forte dans les domaines sociaux. Nous nous heurtons au fait, passé malheureusement sous silence, que la chrétienté est la foi la plus persécutée du monde au même moment où la vague migratoire, en 2015, a rapproché les catastrophes humanitaires des zones de conflit vers notre région. Le gouvernement hongrois a décidé de ne pas garder à l’esprit simplement ses propres réflexions sur la sécurité et ses obligations européennes, mais de s’efforcer de fournir de l’aide pour restabiliser les régions d’émigration. Le secrétariat d’État et le programme d’aide aux chrétiens ont été lancés parce que, d’une part, les chrétiens sont l’une des communautés les plus vulnérables au Proche-Orient et dans la région du Sahel et, d’autre part, parce que nous pensons que le monde occidental aux racines culturelles chrétiennes a une obligation morale importante consistant à s’occuper des chrétiens persécutés ; nous souhaiterions montrer l’exemple à ce sujet.

Ferenc Almássy : Êtes-vous chrétien ?

Tristan Azbej : Oui, je le suis.

Ferenc Almássy : Quelqu’un qui n’est pas chrétien pourrait-il remplir votre fonction ?

Tristan Azbej : L’essence de la démocratie chrétienne n’est pas en premier lieu la foi elle-même mais la protection de la culture chrétienne, l’acceptation des enseignements sociaux chrétiens ou, si vous voulez, de Jésus – la dignité humaine, la protection de la famille, la solidarité envers son prochain, la subsidiarité. La solidarité avec laquelle nous nous tournons vers les chrétiens n’est pas basée sur la foi mais sur l’humain en général, l’humanité.

Ferenc Almássy : Vous avez dit précédemment que l’État hongrois est séculier mais coopère avec les Églises, du moins avec celles qu’il reconnaît. De quelle manière l’État décide-t-il précisément si une Église chrétienne est acceptable ou non ? En plus des Églises catholique romaine, orthodoxe et réformée, il existe de nombreuses Églises protestantes ou néoprotestantes de taille moins importante. Quelle est votre approche vis-à-vis de ces dernières ?

Tristan Azbej : Soyons clairs : ma mission au sein du gouvernement est d’aider les chrétiens persécutés. Il existe un secrétariat d’État à part pour les affaires et les relations des Églises de Hongrie. En ce qui concerne l’aide aux chrétiens persécutés, notre approche est œcuménique, elle se base sur le fait que ceux qui persécutent les chrétiens ne font pas de différences entre des personnes de confession orthodoxe, catholique ou protestante. Peut-être que dans certains pays où les chrétiens subissent des discriminations, il y a quelques communautés orientales plus anciennes qui sont mieux tolérées, mais elles sont elles aussi souvent reléguées à l’arrière-plan. L’État Islamique, ou Boko Haram, a tué de la même manière des chrétiens pentecôtistes que des orthodoxes, et l’œcuménisme se renforce avec le martyre – les confessions s’unissent dans la persécution, nous ne pouvons pas faire de différences non plus. Nous soutenons autant les orthodoxes de Syrie, ou disons les orthodoxes d’Irak, que les catholiques du Nigéria. L’un de nos derniers projets, annoncé il y a peu, soutient expressément les communautés syriennes protestantes, évangéliques et équivalentes aux réformés.

Ferenc Almássy : Quand vous aidez des chrétiens persécutés, la première chose est de clarifier qui est persécuté et qui est chrétien. Comment le faites-vous ?

Tristan Azbej : Si nous voulions décrire très précisément notre activité, notre nom serait le secrétariat d’État chargé de secourir les chrétiens persécutés, menacés et discriminés. Ainsi, par persécution, nous n’entendons pas simplement les cas au sens classique – du moins ceux qualifiés auparavant de persécutions par le droit international – lorsque les autorités étatiques persécutent les chrétiens et commettent des atrocités contre eux. D’ailleurs, ce sont des cas relativement rares, la Corée du Nord serait un bon exemple car dans ce pays, pour le simple fait de posséder une Bible, les autorités condamnent à mort ou déportent dans des camps de travail, ce qui est presque équivalent à la mort. Quand, par exemple, des organisations terroristes menacent ou commettent des attaques sanglantes contre des chrétiens, c’est également de la persécution. En outre, nous ajoutons aussi à cette catégorie les discriminations dans n’importe quel domaine de la vie. Après avoir évalué la situation, il peut y avoir plusieurs modes d’assistance. Quand, par exemple, nous n’avons pas la possibilité de faire pression sur un pays lointain avec des moyens diplomatiques, nous tentons d’argumenter et de soutenir toute initiative concernant la liberté de culte lors des forums internationaux, en nous incluant dans les efforts pour défendre les droits de l’Homme. De manière générale, nous pouvons offrir des moyens humanitaires pour protéger les chrétiens. Nos programmes sont divers, notamment les aides rapides suite à des catastrophes humanitaires ou des attentats terroristes.

Par ailleurs, nous avons lancé et lançons encore des programmes complets d’aide humanitaire pour les chrétiens fuyant les génocides ou d’autres conflits armés dans des régions données. Nous avons de tels projets au Proche-Orient, en Afrique et au Nigéria par exemple. Nous essayons de faire en sorte que ceux vivant dans des conditions misérables au sein de camps de réfugiés puissent retourner le plus vite possible chez eux. Nous essayons de gagner du temps car si ces personnes restent longtemps dans ces camps, elles perdront espoir au bout d’un moment, se mettront en route et rejoindront les vagues migratoires, et cela n’est pas bon pour elles non plus. De plus, l’immigration a de nombreux effets néfastes sur la société et c’est aussi cela que nous aimerions empêcher. S’ils poursuivent leur chemin, c’est néfaste pour la communauté d’origine aussi. Comme l’a dit l’évêque melkite d’Alep, Jean-Clément Jeanbart, l’immigration et les organisations qui soutiennent l’immigration terminent le travail destructeur de l’État Islamique. D’un point de vue budgétaire, la plus grande partie de nos programmes ont pour but de reconstruire les infrastructures endommagées, les écoles, les hôpitaux et les églises détruits. Nous avons des programmes comme cela en Irak et au Nigéria. Par ailleurs, nous avons lancé un programme de bourse dans les universités hongroises pour les jeunes chrétiens persécutés, discriminés, ou seulement menacés. La logique et l’objectif sont que des jeunes qui n’auraient souvent pas pu intégrer l’enseignement supérieur dans leur pays viennent étudier ici. Ils poursuivent des études dans des universités hongroises dans le cadre d’un programme de bourse. Ce programme en est à sa deuxième année et presque 170 boursiers en bénéficient. Ils retourneront chez eux et participeront à la reconstruction de leurs communautés lorsqu’ils auront acquis un savoir de niveau européen.

Ferenc Almássy : Depuis 2015, nous avons fréquemment pu constater que beaucoup de personnes se disant chrétiennes ne l’étaient pas. Il existe même des organisations leur apprenant cela pour pouvoir bénéficier plus facilement de l’asile en Europe. Il n’existe en effet aucun document certifiant qu’une personne soit chrétienne ou pas.

Tristan Azbej : Cette question et la réponse peuvent être divisées en deux parties. Le nom de notre programme est Hungary Helps, c’est-à-dire « La Hongrie aide » – mais pas seulement les chrétiens. Notre soutien envers les chrétiens est appuyé mais pas exclusif. La politique humanitaire de la Hongrie ressemble en de nombreux points à celle d’autres pays développés dans la mesure où nous aidons les personnes en difficulté dans le monde sans prendre en compte la religion ou l’appartenance ethnique. En ce qui concerne l’autre partie de la question, nous ne pensons pas que l’immigration massive soit avantageuse, elle est même expressément néfaste si elle est illégale.

La position du gouvernement est toujours de dire qu’il faut apporter l’aide là où il y en a besoin, et non pas importer les problèmes en Europe. Nous aidons les personnes à rester sur place. Nous nous opposons à la violation de la souveraineté et aux quotas obligatoires que Bruxelles veut nous imposer. Nous respectons les conventions internationales que la Hongrie a rejoint de son plein gré. Nous fonctionnons aussi en tant qu’autorité spéciale de l’asile. Si quelqu’un se tourne vers l’office de l’immigration, il arrive en effet malheureusement qu’il fasse une fausse déclaration pour avoir le statut de réfugié en Hongrie. Dans ces cas, l’autorité de l’asile nous contacte et nous examinons ensemble le fondement de cette déclaration. Pour cela, l’une des unités les plus importantes de notre secrétariat d’État, les capacités de recherche nous aident. Nous examinons la situation et la présence des chrétiens dans ces régions depuis le début de la création du secrétariat d’État.

Ferenc Almássy : Quel est l’objectif et l’intérêt du gouvernement hongrois avec ce programme ?

Tristan Azbej : Notre objectif est de protéger la culture chrétienne, c’est un but patriote d’une part et humanitaire de l’autre. Nous servons nos intérêts nationaux d’un côté et les intérêts de l’humanité de l’autre – nous nous efforçons de contribuer avec les moyens dont un petit pays dispose. La vague migratoire a touché la Hongrie en 2015 avec plus de 10.000 entrées illégales par jour à travers la frontière avec la Serbie, qui est également une frontière de l’espace Schengen, il est donc de notre devoir de la protéger. La protection des frontières du pays face à l’immigration clandestine est un intérêt national, nous voyons que des sociétés parallèles se sont développées en Europe occidentale. En ce qui concerne le terrorisme, nous n’affirmons pas que tous les immigrés sont des terroristes mais même un petit groupe qui peut se radicaliser et qui arrive pour commettre des attentats suffit pour que des attaques soient menées en Europe. C’est ce dont nous voulons protéger les Hongrois et les Européens. Nous voulons protéger dans sa forme actuelle notre société qui est diverse même dans son homogénéité, des peuples qui se sont intégrés avec succès et accepté nos valeurs communes ont rejoint la nation magyare durant les siècles. Je suis moi-même un hongrois d’origine arménienne et française par ailleurs. La capacité d’intégration que l’on connaît ici ne se voit pas en Europe occidentale, c’est aussi pour cela que nous avons annoncé une politique migratoire de bon sens, juste et stricte et avons élargi nos aides humanitaires pour gérer les causes des migrations. Nous voulons faire en sorte que les personnes vivant dans ces régions ne soient pas contraintes de s’en aller. Ainsi, nous soutenons toutes les communautés mais en particulier les communautés chrétiennes qui sont les plus vulnérables et qui nécessitent le plus de fonds.

Logo de Hungary Helps, le programme d’aide humanitaire du gouvernement hongrois.

Ferenc Almássy : Il ne s’agit donc pas seulement de construire l’image du pays ?

Tristan Azbej : La Hongrie est un pays chrétien qui a plus de mille ans. L’Europe a elle aussi été créée par la culture chrétienne. Rappeler cela à nous-mêmes et aux autres aujourd’hui n’est pas une question d’image mais une question humanitaire et d’auto-défense. Nous menons actuellement d’importants programmes dans cinq pays, nous avons alloué 6,8 milliards de forints [environ 20 millions d’euros, ndlr] en deux ans seulement pour les aides aux chrétiens persécutés qui sont une priorité, ce qui est une enveloppe conséquente comparée à la taille de la Hongrie. Selon nos calculs, nous avons réussi à contribuer à ce que 35.000 personnes puissent rester sur place ou être rapatriées.

Ferenc Almássy : Que souligneriez-vous ?

Tristan Azbej : L’histoire de Tel Askouf, près de Ninive, au nord de l’Irak, dans tous les cas. C’est le berceau et un lieu d’habitation des chrétiens depuis 2.000 ans et lorsque l’État Islamique l’a occupé en 2014, les 1.300 familles chrétiennes qui y vivaient ont dû fuir. Jusqu’à ce qu’elle soit libérée en 2016, plus de 900 bâtiments ont été endommagés et le village s’est entièrement vidé. Dans le cadre de Hungary Helps, nous avons versé une aide de 580 millions de forints [soit environ 2 millions d’euros, ndlr] aux chrétiens d’Irak et 1.000 familles ont pu rentrer. Le fait que le village ait été rebaptisé Tel Askouf Fille de la Hongrie montre bien ce que l’aide hongroise signifie pour eux. Il s’agit d’une reconnaissance importante à l’heure où des attaques indignes touchent notre politique. Il est important que les organisations internationales le sachent. Puisqu’il existe sur le plateau de Ninive un village du nom de Fille de la Hongrie, nous souhaiterions qu’il y ait aussi un Fils de la France ou des Petits-Enfants de l’ONU. Nous aimerions que notre exemple soit suivi. Cela peut même être une compétition humanitaire avec d’autres gouvernements qui nous devancent et surpassent notre activité.

Ferenc Almássy : N’est-ce pas un paradoxe que d’aider, en premier lieu, à rester sur place ceux qui, en tant que chrétiens, s’intègreraient plus facilement en Europe que d’autres migrants ? Ne faudrait-il pas plutôt aider davantage ceux qui sont plus problématiques de ce point de vue ?

Tristan Azbej : Nous aidons tous ceux que nous pouvons. Pas seulement les chrétiens mais également les autres communautés vivant avec les chrétiens, c’est ainsi que nous créons nos programmes aussi. Ce ne sont pas que des réfugiés internes chrétiens qui peuvent venir se soigner dans une clinique que nous avons financée, nous ne discriminons pas les autres communautés mais nous recevons de telles critiques également. Un diplomate d’un pays occidental nous a lui aussi accusé de cela et lorsque je lui ai demandé ce qu’ils faisaient au nord de l’Irak, il m’a répondu qu’ils organisaient des ateliers de dialogue interreligieux. Il est important de préciser que nous ne voulons pas forcer notre agenda sur les autres. C’est typique des gouvernements libéraux de gauche ; c’est une mauvaise habitude d’envoyer, par exemple, des préservatifs en guise de dons dans les zones d’Afrique touchées par des catastrophes humanitaires en pensant que la population pouvait être maintenue à long terme ainsi. Il y avait besoin d’autre chose. Et puis il y avait ces cas où l’aide humanitaire était liée aux droits LGBT. Nous, au contraire, ne voulons pas être plus intelligents depuis Budapest que la communauté que nous soutenons. Nous demandons toujours aux dirigeants des communautés chrétiennes locales en quoi nous pouvons les aider. Dans 99% des cas, la réponse est de les aider à rester sur la terre de leurs ancêtres. Nous ne leur imposons pas l’agenda de la société ouverte de George Soros qui, de plus, renforce les migrations.

Ferenc Almássy : Coopérez-vous avec les autorités locales en Syrie ?

Tristan Azbej : Nous ne coopérons pas avec eux. Nous n’utilisons pas d’intermédiaire, ni de grandes agences ou de programmes internationaux, ni les gouvernements et autorités locales dans notre politique de soutien. Ce ne sont pas les agences ou les autorités que nous voulons aider mais les nécessiteux.

Ferenc Almássy : À cause de cela, n’avez-vous pas de problèmes diplomatiques ou de conflits avec les autorités locales ?

Tristan Azbej : La Hongrie se conforme à la politique étrangère commune de l’UE concernant la Syrie, nous respectons les sanctions qui lient les aides pour reconstruire des garanties de démocratie. Nos partenaires sont les Églises, les organisations religieuses en Syrie aussi, et nous soutenons en priorité des programmes qui s’inscrivent dans le cercle de l’aide humanitaire. N’ayant pas de canal diplomatique en Syrie, nous n’y donnons pas de renseignement officiel mais dans d’autres pays, nous informons les autorités et les gouvernements sous le signe du respect et de la confiance mutuels.

Ferenc Almássy : Qu’en est-il de la Chine ? Les relations bilatérales sont de plus en plus étroites mais l’on entend des informations inquiétantes sur la situation des chrétiens locaux.

Tristan Azbej : Les relations diplomatiques entre la Hongrie et la Chine sont fortes, en développement, et se basent sur le respect mutuel. Les gouvernements discutent honnêtement et avec respect les éventuelles réserves, par exemple au niveau des droits de l’Homme, mais pas en public. Notre objectif n’est pas de poser n’importe quelle étiquette ou de faire n’importe quelle autre déclaration sur la Chine qui va a l’encontre du respect mutuel. Nous envisageons l’avenir avec confiance quant à l’accord provisoire établi entre le Saint-Siège et la Chine.

Ferenc Almássy : Vous avez dit précédemment que vous vous réjouiriez si d’autres pays suivaient l’exemple hongrois ? Y a-t-il de l’espoir pour cela selon vous ?

Tristan Azbej : Nous ne pouvons pas résoudre cette crise seuls, c’est pour cela que notre mission prioritaire est d’inciter d’autres pays, en coopérant avec nous ou individuellement, de s’efforcer d’agir contre la catastrophe humanitaire. C’était une démarche diplomatique difficile et qui paraissait assez désespérée au début parce que nous ne sommes même pas encore arrivés sur la ligne de départ. Le fait même que la persécution des chrétiens touche 245 millions de personnes dans le monde n’est pas connu jusqu’à présent de manière générale d’une part, dire que le christianisme n’est pas une religion agressive et expansionniste ne rentre même pas dans la rhétorique des hommes politiques libéraux de l’autre, et, troisièmement certains pays à majorité musulmane ont d’emblée tenté de nier ce phénomène. Avec le temps, nous avons quand même trouvé nos alliés, c’est sans surprise d’abord avec la Pologne, partenaire au sein du V4, que nous avons lancé un programme d’assistance commun l’été 2018. L’objectif était d’aider un orphelinat géré par l’Église orthodoxe syrienne à Homs, mais nous sommes en négociation avancée et prometteuse avec les acteurs gouvernementaux tchèques et slovaques aussi. Notre but est de pouvoir lancer un programme V4 Helps à la place ou en complément de Hungary Helps. D’autre part, nous avons réussi à développer une entente avec les États-Unis dont le gouvernement, de par sa vision du monde et pour des raisons politiques, s’est engagé à protéger les chrétiens persécutés. Cela s’est d’abord produit au niveau politique : le vice-président Mike Pence a annoncé en 2017 que les États-Unis lanceraient un programme à part pour aider les chrétiens du nord de l’Irak et, depuis, d’autres représentants gouvernementaux américains de haut rang ont reconnu le programme hongrois comme étant un modèle. L’échange d’expériences et la réflexion commune a commencé dès le début de l’année 2018. Nous sommes actuellement dans la phase où nous choisissons des projets concrets avec l’USAID, l’agence américaine de développement [Mi-novembre 2019, Tristan Azbej a écrit dans About Hungary que le projet de coopération a abouti, en particulier pour la reconstruction de la ville de Bakhdida, ndlr].