Article originellement publié en hongrois sur Magyar Nemzet le 11 novembre 2020.
Alors qu’en Amérique, la télévision représente la source d’informations politiques la plus importante pour les électeurs, en Hongrie, ce sont les portails d’information sur Internet – comme le fait apparaître l’étude représentative du Lounge Group menée en Hongrie et aux États-Unis à l’occasion des élections présidentielles américaines. D’après ces résultats, en Hongrie, les habitudes en matière de consommation de nouvelles diffèrent considérablement de celles de la consommation générale de produits médiatiques ; aux États-Unis, en revanche, la télévision résiste encore dans son rôle de source majeure d’information politique, même si la consultation de plateformes en ligne est elle aussi de plus en plus répandue.
L’étude représentative du Lounge Group sur le comportement des électeurs en Hongrie et aux États-Unis en rapport avec les élections présidentielles américaines a donné des résultats surprenants. Selon ces résultats portant spécifiquement sur les sources d’informations politiques, les Américains préfèrent la télévision, tandis que les Hongrois donnent la priorité aux portails en ligne.
En examinant les deux pays, on observe des différences nettes entre consommation d’actualités et consommation médiatique générale.
Parmi les Hongrois en âge de voter, les habitudes de consommation médiatique sont presque également réparties entre Internet et la télévision. Cependant, en ce qui concerne les actualités, la politique et les contenus liés à la sphère publique, en Hongrie les portails en ligne sont en tête : 41% des interrogés politiquement actifs ont désigné Internet comme leur plateforme principale. Au même moment, près de 60% des participants américains ont indiqué la télévision comme leur principale source d’informations politiques. Cela n’est pas très surprenant, compte tenu notamment de l’énorme intérêt suscité par les débats télévisés de la campagne des présidentielles. Le premier débat de la campagne, par exemple, a été suivi par 73 millions de téléspectateurs, tandis que lors de la soirée électorale, 71 millions d’américains ont suivi les résultats en direct devant leurs téléviseurs. Pendant les heures de grande écoute, la chaîne Fox News à elle seule a rassemblé 13,7 millions de téléspectateurs, dépassant ainsi même CNN et MSNBC.
En regardant de plus près les différents groupes d’âge, on constate des disparités importantes dans les préférences en matière de consommation d’actualités.
Les jeunes hongrois, notamment ceux âgés de 18 à 34 ans, se sont très clairement tournés vers Facebook et y puisent la plupart des actualités qu’ils consomment. Dans cette tranche d’âge, les portails en ligne arrivent en deuxième position, suivis de la télévision. Mais dès la tranche d’âge des 35-49 ans, on remarque un niveau sensiblement inférieur d’utilisation de Facebook à cette fin – niveau pratiquement identique à celui de la radio. En Amérique, c’est aussi chez les 18-34 ans qu’on trouve le ratio le plus élevé de lecteurs d’actualités sur Facebook, mais chez eux non plus, il n’occupe pas la première place : comme dans l’ensemble de la population politiquement active, la télévision est également la principale source d’informations politiques pour cette jeune génération d’électeurs américains.
« Comme en tout autre domaine, dans les tendances de la consommation médiatique, la mondialisation se fait sentir
– déclare Krisztina Hidvégi, directrice média du Lounge Group. – Et pourtant, s’agissant de questions politiques et sociales, il existe encore des habitudes de consommation partiellement ou complètement divergentes. En Hongrie, cela fait déjà plusieurs années que la télévision et Internet sont au coude-à-coude. Aujourd’hui, ici comme ailleurs, on peut parler de temps d’écran général, étant donné que, sur nos téléphones, nous regardons aussi la télévision, et que nous allons en ligne aussi sur nos écrans de télévision. En Hongrie comme dans le monde entier, la consommation multi-écrans devient prévalente : l’utilisation de la télévision et celle d’Internet se rapprochent dans le temps comme dans l’espace. En d’autres termes : la question n’est pas de savoir si nous consommons d’autres médias ou si la consommation médiatique se mondialise, mais plutôt si nos préférences médiatiques sont les mêmes quand il s’agit de contenus politiques. »
Selon l’étude du Lounge Group, les électeurs américains s’informent plus souvent que les hongrois en matière de questions politiques et d’intérêt public.
Plus précisément : plus de 80% des Américains se renseignent régulièrement sur leur politique nationale et leurs affaires publiques. Parmi les hongrois ayant les mêmes habitudes, cette proportion est inférieure à 60%. De plus, les Hongrois commencent généralement à s’intéresser à la politique et aux questions de société à un âge plus avancé. C’est l’une des raisons pour lesquelles seul un tiers des hongrois âgés de 18 à 29 ans suivent l’actualité politique nationale avec une certaine régularité, alors qu’outre-Atlantique, le même groupe d’âge présente un taux de 70% de consommateurs actifs d’actualités.
« Tant chez les Américains que chez les Hongrois, il est évident que plus les citoyens sont âgés, plus la politique les intéresse. En Hongrie, cependant, l’écart entre générations en termes d’ouverture aux contenus politiques est beaucoup plus grand »
– affirme Krisztina Hidvégi. Le rapport aux questions politiques et d’intérêt public renvoie à des différences fondamentales dans les processus de sociabilisation, qui à leur tour provoquent des différences d’attitude et, en fin de compte, de consommation. En Hongrie, les conversations contradictoires et confrontations d’opinions divergentes sur des questions politico-sociales, par exemple, ne constituent pas un comportement typique. Les Hongrois discutent de leurs opinions plutôt avec les membres de leur famille, ou tout au plus avec de proches amis. Les Américains sollicitent et offrent des opinions sur un éventail bien plus large de sujets : leaders religieux et entreprises locales peuvent, eux aussi, jouer un rôle dans leurs prises de décision, tandis que l’opinion des analystes politiques, des influenceurs et des célébrités est aussi prise en compte par un plus large public – alors que ces derniers, notamment, sont tenus en piètre estime par les Hongrois.
Comme un hongrois sur deux voit d’un mauvais œil que son acteur, musicien ou youtubeur préféré s’exprime sur des questions concernant la vie publique, en Hongrie, il est rare que les personnalités expriment ouvertement leurs opinions politiques.
Il est vrai dans les deux pays qu’environ 25% des électeurs vivent dans ce qu’on appelle aujourd’hui des bulles d’opinion. Cela signifie que la plupart de leurs amis et connaissances ont des opinions tendant à confirmer leur propre point de vue, que ce soit dans la vraie vie ou sur les réseaux sociaux ou autres médias, où ils rencontrent principalement des contenus avec lesquelles ils sont d’accord. En ce qui concerne la formation des opinions politiques, ce n’est pas une tendance très positive, dans la mesure où ces électeurs vivant dans leur microcosme ne sont confrontés à aucune influence susceptible d’élargir leur champ de vision ou d’éclairer leurs décisions.
Aux États-Unis, une enquête a été menée du 5 au 7 septembre 2020, auprès de 2000 personnes, par Cygnal LLC pour le compte du Lounge Group. Le pendant hongrois de l’étude a été réalisé début octobre 2020 par la Fondation Századvég, par sondage en ligne d’un échantillon de 500 personnes, représentatif de la société hongroise du point de vue de l’âge, du sexe et du type d’agglomération habitée. Leurs résultats d’enquête ont également été rapportés par la plus grande agence de presse des États-Unis, l’AP. Les très populaires journaux et portails américains qui publient les résultats du Lounge Group – incluant Yahoo Finance et Marketwatch – atteignent ensemble plus de cent millions de lecteurs chaque mois.
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Traduit du hongrois par le Visegrád Post.