Tchéquie/Pologne – Le 23 février dernier, le ministre tchèque des Affaires étrangères, Tomáš Petříček, avait annoncé que la Tchéquie intentait un procès contre la Pologne devant la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) au sujet de l’extension de la mine de lignite à ciel ouvert de Turów située à Bogatynia en Basse-Silésie, à 20 km, au nord de la ville tchèque de Liberec, les communes frontalières tchèques et allemandes voisines se plaignant en effet de nuisances environnementales graves à cause de cette exploitation.
Arrêt de la CJUE ordonnant l’arrêt immédiat de l’exploitation
Vendredi dernier 21 mai, la CJUE avait en conséquence ordonné l’arrêt immédiat de l’exploitation de la mine de Turów jusqu’à la résolution définitive du conflit avec la Tchéquie à ce sujet, les autorités européennes ayant « considéré qu’en adoptant la disposition autorisant l’extension de la concession minière de lignite à six ans [de 2020 à 2026,ndlr.] sans effectuer d’étude d’impact environnemental, le pays enfreignait la directive sur l’évaluation des incidences sur l’environnement ». Et la vice-présidente de la CJUE, la juge espagnole Rosario Silva de Lapuerta – proche du Partido popular dont son oncle fut le trésorier –, d’expliquer :
« La Pologne est obligée de cesser immédiatement l’extraction de lignite dans la mine de Turów. Les allégations soulevées par la République tchèque concernant le statut factuel et juridique justifient l’ordonnance des mesures provisoires demandées ».
Un problème d’ordre stratégique pour l’économie polonaise
Or cette décision posait un réel problème à la Pologne, comme Mateusz Morawiecki l’a immédiatement souligné à la suite du jugement de la CJUE : « Aucune décision de la Cour de justice de l’Union européenne ne peut violer des domaines liés à la sécurité fondamentale des États membres. La sécurité énergétique appartient à ce domaine […]
Jusqu’à 4 à 7% de la production d’électricité de la Pologne est liée à la mine de Turów. Son fonctionnement stable détermine la possibilité de fonctionnement des maisons, écoles, hôpitaux et entreprises polonaises. Son fonctionnement stable affecte la sécurité, la santé et la vie de millions de citoyens polonais. […] C’est la vie normale des citoyens de notre pays ».
Le ministre polonais du Développement, Jarosław Gowin, déclarait de son côté que l’arrêt de la CJUE était « scandaleux » et conduirait à « la perte de dizaines de milliers d’emplois et de très graves perturbations dans le système énergétique polonais ».
Rencontre Morawiecki-Babiš en marge du sommet européen de Bruxelles
C’est pourquoi, tandis que Jaroslaw Gowin, déclarait hier matin que la Pologne ne fermerait pas la mine de Turów – considérée comme stratégique pour l’économie polonaise –, le premier ministre polonais a décidé de prendre les choses en main et de tenter de résoudre ce problème, essentiellement bilatéral tchéco-polonais, directement avec son homologue tchèque Andrej Babiš qu’il a rencontré personnellement ce lundi 24 mai en marge du sommet européen de Bruxelles, et a déjà obtenu un accord en conséquence duquel la République tchèque a accepté de retirer sa plainte.
Accord amiable entre MM. Morawiecki et Babiš
« Compte tenu du resserrement de la coopération transfrontalière avec la République tchèque, il semble que nous soyons déjà très proches d’un accord. À la suite de cet accord, la République tchèque a accepté de retirer sa plainte auprès de la CJUE »,
a ainsi fait savoir le chef du gouvernement polonais cette nuit sur Twitter. « Nous avons convenu de nommer une commission d’experts qui enquêtera sur les problèmes environnementaux liés à la mine à ciel ouvert [… La société] PGE [Polska Grupa Energetyczna] achèvera également les investissements de l’écran de terre, qui éliminera au moins l’écoulement de l’eau dans une certaine mesure, et d’autre part, il travaillera sur les remblais, qui doivent protéger contre la poussière qui pénètre du côté tchèque […] L’accord avec la République tchèque suppose des projets à long terme avec la participation de la partie polonaise à hauteur de 45 millions d’euros […]
À la suite de la mise en œuvre du plan, nous pourrons dire que toute l’affaire est close et que la centrale électrique de Turów et la mine fonctionneront sans aucun obstacle. Nous voulons que ce différend se termine à l’amiable et aboutisse ».