Italie – Tout acte entraîne des conséquences. Giorgia Meloni (FdI) est restée fidèle à ses principes, tandis que Matteo Salvini (Lega) s’est aligné sur la bande à Draghi.
Même si les résultats de sondages en Italie sont bigarrés et erratiques, c’est la première fois depuis des années qu’on voit un sondage aussi décevant pour la Lega. Certes, elle mène encore d’une courte tête dans beaucoup d’autres sondages, mais la tendance est sans équivoque : Meloni gagne du terrain et la Lega en perd.
Il s’agit là à la fois d’une bonne et d’une mauvaise nouvelle pour l’Italie … ainsi que pour le groupe de Visegrád, qui a grand besoin de s’allier à un autre gouvernement anti-immigration, l’Italie étant un candidat idéal de par sa taille et sa situation géographique. Sans même parler du désastre que risquent de produire les élections à venir en République tchèque (nous y reviendrons).
- La bonne nouvelle : le parti national-conservateur FdI de Meloni (affilié au groupe CRE du PE), en pleine ascension, a atteint un nouveau record de 20,5% dans le dernier sondage Ipsos. Ce qui le fait arriver potentiellement ex aequo à la première place – et c’est la première fois que cela se produit. Son ascension a été impressionnante, Meloni faisant preuve d’un professionnalisme exemplaire.
- La mauvaise nouvelle : dans le dernier sondage Ipsos, la Lega tombe en troisième place, dépassée même par le Parti démocrate (PD : parti de gauche affilié au groupe S&D), pour la première fois depuis plusieurs années. Matteo Salvini semble traverser une crise d’identité qui a endommagé sa crédibilité.
Bien que je sois un fervent partisan de Meloni (FdI), il faut garder à l’esprit que la santé de la Lega est d’une importance cruciale pour notre cause, même si on peut douter du bien-fondé de sa stratégie des derniers mois, qui n’apporte visiblement pas à Salvini les résultats escomptés. Il y a quelque-chose qui cloche avec Salvini : il doit renoncer à la stratégie consistant à se donner une nouvelle image pour faire sa propre promotion, sous peine de passer pour un opportuniste.
Il ne s’agit plus du Salvini qui avait tenu tête à l’establishment de Bruxelles il y a deux ans en bloquant les ports italiens. Il faut se souvenir qu’en 2019, la Lega avait dominé les élections européennes en Italie, devançant de 11% le PD en deuxième position.
Or nous abhorrons les socialistes du PD et tout ce qu’ils représentent. Comment la Lega a-t-elle pu rater une pareille opportunité ?
Salvini doit vraiment revoir sa stratégie de soutien à ce gouvernement d’unité mené par l’eurocrate Draghi, qui n’a rien fait pour arrêter la vague migratoire en Italie. Comme son prédécesseur Renzi, Draghi voit la solution du problème dans la réaffectation des migrants dans d’autres pays du bloc, ce qui est à la fois contreproductif et irréaliste.
Mais qui, au sein de la Lega, susurre ces affreux conseils à l’oreille de Salvini ? Pour Salvini et son parti, la solution n’est pas une fusion avec Forza Italia (affiliée au PPE) de Berlusconi, ni de chercher à être encore plus européiste que le PD, mais de se débarrasser de ce statut d’opposition contrôlée et de revenir aux principes qui avaient permis à la Lega de dominer la scène politique italienne.
Aux prochaines élections, l’Italie, l’Europe et le V4 ont besoin à la fois du succès de Meloni et d’un Salvini fort. Or à l’heure actuelle, Salvini perd de sa crédibilité et doit réévaluer les conseils que lui prodigue son entourage au sein de la Ligue – les cercles qui l’ont convaincu d’entrer dans ce gouvernement, en dépit de sa récalcitrance initiale.
Certes, les décisions récemment prises par Salvini ont pu en étonner beaucoup, voire les décevoir, mais il ne faut pas oublier l’importance cruciale que revêtent la force et l’unité d’une coalition des droites en Italie.
On peut se demander ce que Berlusconi et sa Forza Italia (membre du PPE) comptent faire. En tout état de cause, ce n’est pas un parti qui nous inspire confiance, ni sur le fond, ni sur la forme.
Or, il y a quelques semaines, Salvini et Berlusconi se sont rencontrés (sans Meloni) pour discuter d’une pérennisation de leur alliance.
Il y a vraiment quelque-chose qui pue dans cette histoire.
Il a toujours été clair, au sein de l’alliance tripartite des droites, que le prochain premier ministre serait issu du parti obtenant le meilleur score électoral.
En voyant Meloni gagner du terrain, Salvini serait-il en train de chercher le salut en fusionnant avec un parti affilié au PPE, et dirigé par un homme (Berlusconi) qui semble ne jamais devoir dépasser la crise de la quarantaine ?
Cette rencontre a soulevé encore plus de questions concernant les ambitions et le jugement de Salvini, qui devrait comprendre que la cause est plus importante que sa personne.
Espérons que l’ego de Salvini ou son désir d’être « accepté » par l’UE ne mette pas en danger l’unité des droites lors des prochaines élections italiennes. Il semble cependant que cet arrangement ait créé certaines tensions.
Contrairement à Forza Italia et à la Lega, l’autre groupe du centre-droit – les Frères d’Italie (FdI) de Giorgia Meloni – ne soutient pas le gouvernement « d’unité nationale » du Premier ministre Mario Draghi.
Meloni fait bien de rester à contre-courant. Ce gouvernement « d’unité nationale » est une parodie, rien de plus qu’un piège de l’UE en vue de contrôler l’opposition, tout comme la CSU en Allemagne, dont le rôle est d’empêcher la légitime émergence de véritables conservateurs nationaux.
Salvini veut-il finir comme ce pauvre Horst Seehofer et sa CSU de Bavière, qui ont vendu leur âme pour un strapontin à la table de Merkel ?
Il est temps pour Salvini de se recentrer sur l’objectif principal, en se libérant de ce gouvernement d’unité nationale dont le ministre de l’Intérieur est un fervent immigrationniste ! Comment peut-il se regarder dans la glace, alors que le gouvernement auquel il appartient continue à laisser inonder le pays par des vagues de mâles agressifs issus de cultures allogènes ? Salvini a certes protesté (comme Seehofer en Allemagne), mais la Lega, pour autant, choisit tout de même librement de rester au sein de ce gouvernement (comme la CSU en Allemagne).
Peut-être serait-il temps pour Viktor Orbán, figure de proue de la droite au sein de l’UE, d’organiser une rencontre à trois, à huis clos, pour tout se dire. Après tout, l’Autriche étant perdue pour le moment et la Tchéquie dans la tourmente, la Hongrie et la Pologne commencent à avoir le dos au mur.
Un gouvernement Meloni-Salvini en Italie pourrait changer la donne … et contribuer à conférer un poids critique à la nouvelle coalition de droite en cours de formation (incluant les groupes CRE et ID, et la Hongrie indépendante). Avec deux des six plus grosses économies de l’UE (l’Italie et la Pologne), cette coalition pourrait contrebalancer efficacement l’axe franco-allemand.
Le fils prodigue de la droite doit rentrer au bercail.