Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Soupçons de corruption : perquisition à la chancellerie autrichienne

Temps de lecture : 3 minutes

Autriche – Pour la première fois dans l’histoire de la république d’Autriche, la chancellerie fédérale a fait l’objet, en ce 6 octobre, d’une perquisition ordonnée par le parquet. Au même moment, des opérations similaires se déroulaient à Vienne tant au ministère des Finances qu’au siège du Parti populaire autrichien (Österreichische Volkspartei, ÖVP, centre-droit au pouvoir), dont le président n’est autre que le chancelier Sebastian Kurz.

Corruption et détournement de fonds publics ?

Le parquet autrichien mène en effet une enquête sur des faits supposés de corruption. Parmi la dizaine de personnes suspectées – il n’y a à ce stade pas encore d’inculpations dans cette affaire – figurent outre le chancelier Kurz (ÖVP), Thomas Schmid (ÖVP), ancien chef de cabinet et secrétaire général du ministère autrichien des Finances, ainsi que les frères Wolfgang et Helmuth Fellner, respectivement éditeur et propriétaire du quotidien gratuit Österreich.

L’enquête porte essentiellement sur des soupçons de sondages et de reportages manipulés dans l’optique de soutenir l’ascension de Sebastian Kurz jusqu’à la chancellerie, des « prestations » qui auraient été rémunérés par le biais d’annonces ministérielles publiées dans ledit journal ainsi que sur son site oe24.at.

Si ces faits venaient à être avérés, ils relèveraient non seulement de la corruption mais aussi du détournement de fonds publics. Ces accusations sont donc de la plus grande gravité.

Des « accusations construites » selon l’ÖVP 

Le parti du chancelier Kurz a réagi hier soir à ces perquisitions par un communiqué : « Après les fausses accusations déjà portées contre Sebastian Kurz, Josef Pröll, Gernot Blümel, Hartwig Löger, Bernhard Bonelli et d’autres, qui se sont entre-temps toutes avérées sans fondement, 

de nouvelles accusations sont maintenant construites sur des événements qui remontent en partie à cinq ans. Cela se passe toujours avec le même objectif et le même système : nuire massivement au Parti populaire et à Sebastian Kurz ». 

Pour « Österreich », il ne s’agirait pas des mêmes sondages 

De son côté, le quotidien Österreich a également exposé son point de vue dans une dépêche de l’APA : « Totalement indépendamment des sondages politiques réalisés pour le quotidien Österreich,

l’institut ‘Research Affairs’ a apparemment aussi réalisé des sondages et des études pour le ministère des Finances, tout comme la plupart des instituts autrichiens d’études d’opinion

qui travaillent sur commande des ministères ou des groupes d’intérêt. Ces enquêtes n’ont aucun lien avec le groupe de médias Österreich, elles ont été proposées à la publication au quotidien Österreich – comme d’ailleurs à de nombreux autres médias – de manière totalement indépendante des enquêtes commandées par Österreich. Ces enquêtes du ministère des Finances et de la Recherche n’ont jamais eu pour contenu […] une préférence électorale ou un sondage électoral, mais concernaient dans l’ensemble des questions fiscales, financières, européennes et budgétaires. De petites parties de ces enquêtes ont été publiées non seulement dans Österreich mais aussi dans de nombreux autres médias ».

Sebastian Kurz exclut de démissionner 

Invité du grand journal télévisé de 22 heures, le ZiB2, sur l’ORF, ce 6 octobre, le chancelier Kurz s’est défendu en niant toute implication dans cette affaire, excluant « à 1000 % le fait qu’il puisse lui-même présenter ou recevoir de fausses factures pour des sondages ou y être impliqué de toute autre manière » et rappelle qu’à l’époque, en 2016, il n’était pas encore président de l’ÖVP, mais seulement ministre des Affaires étrangères. En conséquence, il exclut totalement de démissionner de la chancellerie, comme l’opposition le réclame.

Unité inhabituelle de l’opposition 

Dans l’opposition, on voit bien naturellement les choses sous un angle sensiblement différent. La présidente du Parti social-démocrate autrichien (SPÖ, socialistes), Pamela Rendi-Wagner a ainsi déclaré :

« Nous sommes tous témoins de la déchéance morale de l’ÖVP […]. Il y a de sérieuses accusations sur la table. Il s’agit d’une incitation au détournement de fonds et à la corruption.

Si l’on prend au sérieux la responsabilité politique – et un chef de gouvernement porte une haute responsabilité politique – et si l’on a une once de décence, alors le chancelier lui-même devrait en tirer les conséquences. Nous allons demander une session spéciale au Parlement ». Un avis partagé – une fois n’est pas coutume – par le président du FPÖ (nationaux-libéraux), Herbert Kickl, qui appelle le chancelier à démissionner au plus vite :

« Si Sebastian Kurz ne tire pas la seule conséquence possible d’ici la date de la session spéciale [du parlement], nous l’y aiderons par le biais d’une motion de censure ».