Pologne/Union européenne – La Diète polonaise a approuvé ce jeudi 26 mai (par 231 voix contre 208 et 13 abstentions) le projet de loi présenté par le président Andrzej Duda visant à dissoudre la chambre disciplinaire de la Cour suprême – afin de débloquer 35 milliards d’euros de fonds européens que la Commission européenne retenait pour faire pression sur Varsovie à ce sujet.
Cette loi permet d’obtenir les fonds pour financer le plan de relance polonais
Le Premier ministre Mateusz Morawiecki, qui a au passage critiqué que les députés de l’opposition n’approuvent pas une loi « approuvée par la Commission européenne », a ainsi expliqué devant la Diète que
« la Commission européenne a examiné cette loi […] présentée par le président Andrzej Duda et a déclaré qu’il s’agissait d’une passerelle vers le Fonds de relance.
[…] Nous avons fini de négocier les étapes clés. Et je voudrais dire à l’Assemblée que jeudi prochain, le 2 juin, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sera ici pour signer les étapes clés liées au Fonds de relance ».
De son côté, le chef de cabinet du Président de la République, Pawel Szrot, a salué l’approbation par la Diète du projet proposé par Andrzej Duda :
« Tous les éléments clés du projet de loi du président Andrzej Duda visant à modifier la loi sur la Cour suprême sont restés dans le projet adopté par la Diète polonaise. Compromis à la maison, compromis à l’étranger ».
Même son de cloche de la part du porte-parole du gouvernement, Piotr Müller : « [Cette loi] remplit les jalons qui ont été acceptés dans le cadre du Plan national de relance ».
Polémique quant à l’indépendance des juges de la chambre disciplinaire
La réforme de la Justice mise en place par le PiS avait institué, par la loi du 8 décembre 2017, une chambre disciplinaire, auprès de la Cour suprême, ayant compétence pour sanctionner voire révoquer des juges, afin de mettre fin à l’impunité dont bénéficiaient de facto les juges depuis la chute du communisme. Or, les membres de ladite chambre disciplinaire étant nommés par le président de la République sur proposition du Conseil national de la magistrature (KRS), dont 15 des 25 membres (des juges) sont, depuis la réforme, eux-mêmes désignés par la Diète et non plus par leurs pairs, les opposants arguent que le Conseil national de la magistrature et la chambre disciplinaire ne sont pas indépendants du pouvoir en place.
La loi adoptée ce jeudi 26 mai par la Diète prévoit de confier les compétences de la chambre disciplinaire désormais dissoute à une « Chambre de la responsabilité professionnelle » nouvellement instituée et qui sera composée de onze juges nommés pour cinq ans par le président de la République au sein d’un groupe de 33 juges tirés au sort parmi l’ensemble des membre de la Cour suprême (sauf le président de ladite cour). Il est donc considéré que ce mode de désignation apporte plus de garantie quant à l’indépendance des juges de cette nouvelle Chambre de la responsabilité professionnelle.
Conformément au processus législatif, la loi doit encore être approuvée par le Sénat – où l’opposition est majoritaire – ou revenir à la Diète avant que le président Andrzej Duda ne puisse la promulguer et qu’elle obtienne force de loi. À ce sujet, le maréchal du Sénat, Tomasz Grodzki (PO), a déclaré être « en contact avec la Commission européenne » : « Les sénateurs, la commission législative, ont besoin d’un peu de temps pour améliorer cet acte législatif, parce que dans cette version, nous ne l’aimons pas nécessairement, mais il est en train d’être approuvé en ce moment ». A priori, cela pourrait avoir lieu dès la semaine prochaine.