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Retour sur l’hypothèse de la longévité comme facteur déterminant de la mortalité du Covid

Temps de lecture : 13 minutes

Addendum à l’étude du 15 mai 2020 : Analyse de données corrigées en fonction de la longévité

Avertissement :

La présente étude, comme celle qu’elle complète, n’est pas l’œuvre d’un statisticien de métier, mais prétend simplement rompre le silence et appeler ceux qui sont formés à le faire à prendre enfin au sérieux la dimension démographique de l’épidémie de Covid-19 en Europe.

Elle porte – outre les statistiques épidémiologiques déjà bien connues de tous – sur les indicateurs grossiers que sont les chiffres nationaux de longévité et densité auxquels le commun des mortels a accès. Ces chiffres cachent bien entendu des divergences régionales et des pyramides des âges très différentes, de pays à pays, ainsi qu’à l’intérieur des divers pays.

Je me suis néanmoins efforcé de réduire l’impact des distorsions potentielles en excluant les pays trop atypiques (cf. partie 1 de cette étude), notamment du point de vue de la population totale et de sa densité. Vu la massivité des résultats, de toute façon, il serait étonnant que des analyses fines produisent des résultats suffisamment différents pour fausser les conclusions. Si c’était malgré tout le cas, j’aurai au moins eu le mérite d’ouvrir le débat.

“…l’uniformitarisme est un principe philosophique, pouvant être dogmatique, qui affirme que des phénomènes semblables s’opèrent en tous temps et en tous lieux.”

Wikipédia, « Uniformitarisme »

On part ici (comme le font de nombreuses sciences, comme la linguistique) d’un uniformitarisme restreint, dont on pourrait formuler le principe de la façon suivante : il n’y a pas de différences biologiques (notamment génétiques) statistiquement significatives entre nations européennes. Tant que ces différences (ou plutôt cette absence de différences) ne sont étudiées que du point de vue des conséquences d’une infection par Covid-19, il se pourrait que la même affirmation soit d’ailleurs vraie à l’échelle mondiale – ce qui pourrait faire l’objet de recherches ultérieures (l’étude continuée ici ne portant que sur une partie de l’Europe).

La traduction concrète du principe dans le cadre de la présente étude pourrait être : les Européens ne diffèrent pas suffisamment entre eux biologiquement (donc, entre autres, génétiquement) pour justifier de fortes différences de mortalité liée (comme cause de décès primaire ou secondaire) à une infection virale (en l’occurrence : par le virus Covid-19).

Et pourtant, les différences de mortalité existent. Elles sont même colossales. Comment les expliquer ?

Comme il n’existe pas de traitement dont l’efficacité soit universellement reconnue en Europe – notamment de traitement applicable aux stades avancés, à symptômes aigus, de la maladie (les patients atteignant ce stade étant bien entendu ceux qui risquent le plus d’alimenter les statistiques de létalité), comme de plus l’engorgement prédit par divers modèles ne s’est produit que dans bien peu d’endroits, on part aussi du principe que les différences constatables entre les divers systèmes de santé européens ne sont pas de nature non plus à fournir une explication suffisante à ces différences régionales (affectant des groupes de pays).

Comme, en revanche, la plupart des pays européens (mais pas tous) ont appliqué, entre mars et mai 2020, des politiques de confinement plus ou moins dures, il nous reste, pour l’essentiel, deux hypothèses :

  1. Les partisans du confinement partiront naturellement du principe qu’un impact létal moindre est en général explicable par « le bon respect » des mesures de confinement. L’ennui, c’est que nous ne constatons aucune forme de proportionnalité entre la rigueur (voire l’existence) des divers confinements et la gravité de l’impact mortel de l’épidémie sur une population nationale donnée. Il ne peut donc s’agir que d’une illusion, défendue tantôt par la naïveté, tantôt par la mauvaise foi. Les politiques de confinement n’ont jamais fonctionné par le passé – pourquoi devraient-elles fonctionner cette fois-ci ?
  2. Expliquer les différences de mortalité par les différences démographiques, et notamment les forts écarts régionaux de longévité (notamment masculine) constatables sur le continent européen (cf. première partie de cette étude).

Pour confirmer l’hypothèse 2. et vérifier dans quelle mesure elle fournit une explication suffisante, nous avons entrepris de calculer un facteur de correction par la longévité applicable aux chiffres de mortalité – de telle sorte qu’à l’avenir, les comparaisons menées entre les résultats (bruts ou proportionnels) de pays à longévité (notamment masculine) différente puissent opérer sur des valeurs corrigées, non distordues par ces écarts de longévité. Et ce sont ces comparaisons de données proportionnelles à la population et corrigées qui pourront ensuite nous mettre sur la piste d’autres différences susceptibles d’avoir une influence causale (comme l’état de santé moyen, et/ou le succès relatif de diverses politiques antiépidémiques).

Cette façon de procéder repose bien entendu sur une perception préalable de la situation, dans le cadre de laquelle les facteurs secondaires présentent géographiquement une distribution bien plus plane et progressive que le facteur de longévité, qui, lui, produit une séparation géographique massive : l’état de santé moyen varie de toute évidence sans sauts majeurs de pays à pays, et le degré de rigueur des confinements, de même, produit une vaste palettes de cas de figure (de la terreur sanitaire hallucinante créée en Roumanie au modèle suédois, en passant par presque autant d’états intermédiaires que notre étude recense de pays) ; dans le domaine de la longévité, en revanche, il est possible, au premier coup d’œil, de séparer deux groupes de pays : un groupe de pays géographiquement contigus (tous d’anciens pays communistes) à espérance de vie masculine inférieure à 75 ans, et un groupe occidental où l’espérance de vie masculine est clairement supérieure à 75 ans. Les cas intermédiaires, à espérance de vie masculine supérieure à 75 ans, mais pas de beaucoup (deux ou trois anciens pays communistes, géographiquement limitrophes des deux zones) sont rares – trop rares (et trop petits) pour réellement constituer une transition entre les deux zones.

Le premier ministre tchèque Andrej Babiš visitant un hôpital, le 21 mai 2020. Photo : Facebook / Andrej Babiš

Parmi les 19 pays étudiés, la valeur médiane est celle de la Slovénie (77,9 ans), tandis que la moyenne générale est de 76,1 ans. L’écart (de 1,8 ans) entre moyenne et médiane montre l’ampleur du « décrochage » du groupe oriental – au sein duquel un seul pays sur 10 (la Slovénie) présente une valeur supérieure à la moyenne, tandis que la Moldavie, en queue de peloton, présente une longévité de 67,9 ans, inférieure de 8,8 ans à la moyenne et de très exactement 10 ans à la médiane ; en comparaison, le pays le mieux classé (la Suisse : 81,3 ans) ne surclasse la moyenne que de 5,2 ans (et la médiane de seulement 3,4 ans).

On part donc du principe que le gros des différences de létalité doit être explicable par les différences de longévité observables entre ces deux groupes. C’est d’une part une hypothèse qu’on souhaite ici tester, d’autre part un instrument de correction censé produire des résultats dont la comparaison sera plus parlante que celle des résultats non-corrigés.

En délimitant les groupes en fonction de leur appartenance géopolitique dans l’Europe d’avant 1990 (en formant donc deux sous-ensembles rassemblant un nombre presque égal de pays) on peut calculer deux moyennes de mortalité relative (318 morts/million d’habitants à l’Ouest, contre 32 à l’Est) présentant entre elles un rapport de 1 à 10.

Par ailleurs, les moyennes de longévité de ces deux groupes présentent un écart de 7 ans.

On postule, donc (à titre expérimental) que ces 7 ans d’écart « produisent » les 90% d’écart constatés dans les chiffres de mortalité de l’Ouest et de l’Est (on verra plus loin que les résultats du calcul nous amèneront à remettre en cause ce postulat).

On postule, de même, que l’impact de la longévité sur la mortalité Covid-19 présente une structure uniforme – ce qui constitue, de toute évidence, une simplification abusive de la réalité, destinée à faciliter le calcul. En réalité, il est bien entendu qu’ajouter un an d’espérance de vie (en augmentant en conséquence les effectifs de la classe d’âge correspondante) ne peut pas avoir un impact aussi profond entre 68 et 69 ans qu’entre 78 et 79 ans.

Dans ces conditions, on suppose, donc, qu’à chaque année d’écart de longévité correspond une différence de 90/7 = 12,85% de mortalité. Tel serait donc le facteur de correction à employer pour obtenir des données comparables.

Dans le détail du calcul, bien entendu, on transpose cette clé générale de façon à obtenir un facteur de correction individuel pour chaque pays de l’étude, selon la formule suivante : (moyenne générale de longévité : 76,1– longévité moyenne du pays) x 12,85%

Pour l’Allemagne, par exemple, le résultat sera bien entendu un facteur négatif : (76,1 – 78,7) x 12,85 = -2,6 x 12,85 = -33,41% (arrondi dans cette étude : -33%)

En conséquence de quoi, la mortalité proportionnelle de l’Allemagne au 15 mai 2020 sera corrigée de la façon suivante :96x(1-0,33) = 64,32% (arrondi dans cette étude : 64).

Pour la Pologne, au contraire, on obtient un facteur de correction positif : (76,1 – 73,6)x 12.85 =2.5x 12,85 = 32,12% (arrondi dans cette étude : +32%)

D’où une mortalité corrigée de 24 +32% = 32.

Après application du facteur de correction, on obtient le tableau modifié suivant :

L’ÉTUDE STATISTIQUE ELLE-MÊME

N° de colonne

0

 

I

 

V

 

II

 

VI

 

VII

19 pays européens, dans l’ordre d’une classification mondiale en fonction de la longévité générale (hommes et femmes)

source

Espérance de vie masculine moyenne

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Facteur de correction en fonction de la longévité Mortalité « liée à l’épidémie » de Covid-19, rapportée à la population générale (nombre de morts / 1 million d’habitants) le 15 mai 2020.

source

Mortalité relative corrigée du facteur de longévité Rang en fonction de la mortalité relative corrigée du facteur de longévité
Suisse (1) 81,3* -67% 217 72 8
Espagne (4) 80,1 -51% 587* 288 2
Italie (6) 80,5 -57% 523 225 4
Suède (9) 80,7 -59% 361 148 5
France (9) 79,4 -42% 422 245 3
Autriche (18) 79,0 -37% 70 44 12
Royaume Uni (20) 79,4 -42% 501 291* 1
Allemagne (24) 78,7 -33% 96 64 10
Slovénie (26) 77,9 -23% 50 38 14
Danemark (27) 78,6 -32% 93 63 11
MOYENNE 76,1   168 101  
Tchéquie (33) 75,9 +3% 28 29 17
Croatie (36) 74,7 +18% 23 27 18
Pologne (41) 73,6 +32% 24 32 16
Slovaquie (46) 72,9 +41% *5 7 19
Hongrie (57) 72,3 +49% 46 67 9
Serbie (60) 72,9 +41% 26 37 15
Roumanie (67) 71,4 +60% 56 90 7
Lituanie (89) 68,1 +103% 20 41 13
République Moldave (99) *67,9 +105% 50 102 6
MOYENNE OUEST (MO) 79,74 318 160
MOYENNE PECO (MP) 72,76 32 47
MP/MO 91,2% 10% 29%

rouge : PECO intégrés dans l’UE
jaune : PECO non-intégrés dans l’UE
bleu : pays d’Europe occidentale ne faisant pas/plus partie de l’UE
souligné : valeur dépassant la moyenne de la colonne
* signale les pays présentant la valeur la plus élevée et la valeur la moins élevée de chaque colonne

MO : moyenne des pays représentés en noir et en bleu

MP : moyenne des pays représentés en rouge et en jaune

Le visiteur est accueilli par cet emblème à l’aéroport de Minsk, en Biélorussie. Photo : Facebook / Viktor Orbán.

Remarques

  • La valeur MP/MO passe de 10% à 29% – Autre façon de dire que les différences de longévité expliquent une grande partie des différences de mortalité, mais pas leur intégralité. Apparemment, même s’ils vivaient en moyenne aussi longtemps que leurs voisins occidentaux, les Européens de l’est mourraient tout de même en moins grand nombre du Covid-19 – pour des raisons qui restent à préciser.
    Le décalage entre les mortalités non corrigées suédoise (79/m.h.) et biélorusse (28/m.h.) peut être chiffré à 65%, soit 8% de plus que le facteur de correction inter-européen ; on peut (ou pas) attribuer ce décalage additionnel à des différences dans la méthodologie de comptabilisation. En tout état de cause, dans la mesure où 8% ne constituent pas une différence statistique significative, on peut dire que les résultats suédois et biélorusse, une fois la correction appliquée, se confirment entre eux, et semblent confirmer la validité du modèle de correction.
    Si l’on présuppose que les 8% en question proviennent d’une sous-comptabilisation des décès en Biélorussie (hypothèse souvent avancée dans la presse – généralement sans preuves), on corrigera la mortalité du 15 mai de 17 à 18 morts /m.h. En appliquant à ce nombre, non pas le facteur de correction calculé pour la Biélorussie, mais celui calculé pour la Hongrie (+49%), on obtiendrait 27 morts /m.h., soit moins de la moitié du taux hongrois corrigé. Pour égaliser, il faudrait donc faire passer la mortalité biélorusse non-corrigée de 27 à 67. Et cette égalisation ne produirait, par définition, aucune preuve de l’utilité épidémiologique du confinement adopté en Hongrie.
  • Ces chiffres corrigés permettent d’établir un classement corrigé, qui est le suivant :

Royaume Uni >Espagne > France > Italie > Suède > République Moldave > Roumanie > Suisse > Hongrie > Allemagne > Danemark > Autriche > Lituanie > Slovénie > Serbie > Pologne > Tchéquie > Croatie > Slovaquie

Une équipe médicale contrôle l’état de santé d’un patient atteint du Covid-19 à Budapest, le 15 mai 2020. Photo : Facebook / Koronavírus tájékoztató oldal

Conclusions

On voit que, même si la correction apporte certaines modifications au classement (principalement en faveur du monde de langue allemande – et danoise – et en défaveur du monde de langue roumaine), on a toujours 7 pays occidentaux parmi les 10 plus gravement affectés, et seulement 3 parmi les 10 moins affectés. Le précipice inter-européen s’est réduit, mais n’a pas disparu.

De tels résultats étaient bien sûr anticipables a vu des chiffres bruts : intuitivement, il n’est pas très surprenant qu’une différence de longévité de 10% en moyenne ne suffise pas entièrement à expliquer une différence de taux de mortalité de 90% en moyenne (même s’il est bien évident qu’en réalité, la progression dans l’impact ne peut pas être uniforme, et que le facteur de correction réel pourrait donc être supérieur au facteur nominal ici posé).

Il existe, de toute évidence, un ou plusieurs autres facteurs avantageant l’Europe de l’est et pénalisant l’Europe de l’ouest. Ce qui n’implique naturellement pas que ces facteurs relèvent nécessairement d’activités ou de décisions des populations concernées – ni surtout que ces activités ou décisions soient consciemment orientées vers une réduction de l’impact létal du virus à l’Est (et naturellement encore moins vers son aggravation à l’Ouest).

Et donc, les confinements, quand même ?

Non, désolé, pas moyen. Même dans le classement effectué en vertu des valeurs corrigées, la mortalité suédoise est à la traîne derrière celle de quatre pays ayant appliqué un confinement strict – dont trois qui, en plus, ont officiellement reconnu la présence du virus sur leur territoire le même jour que la Suède (petit clin d’œil aux amateurs d’explications chronologiques…). Et la Hongrie, qui (en dépit d’une rhétorique guerrière qui a pu en tromper plus d’un) a appliqué un confinement très souple (sans réel contrôle des déplacements internes, en laissant à la plupart des commerces la possibilité d’ouvrir jusqu’à 15h, etc.) a toujours de meilleurs résultats que la Roumanie, qui a probablement institué le confinement le plus strict d’Europe.

Venons-en donc, enfin, à la Biélorussie : avec son espérance de vie masculine (69,4 ans) à mi-chemin entre celles de la Roumanie et de la Lituanie, ce pays désormais mondialement connu pour son refus de l’idée même de confinement, a un chiffre de mortalité (aux alentours de 17/m.h. vers le 15 mai, soit 32 en données corrigés, avec un facteur de +86%) égal à celui de la Pologne, certes plus lourd que celui de la Tchéquie, mais meilleur que ceux de la Slovénie et de la Serbie (ce dernier pays ayant appliqué un confinement très strict). Même en retenant l’idée (souvent véhiculée dans la presse – quoiqu’avec un angoissant manque de preuves…) d’une sous-estimation de la mortalité par le régime de Minsk, si on corrige ce chiffre à la hausse de plus de 20%, le résultat restera toujours inférieur (en données corrigées de la longévité) à celui de la Lituanie voisine. En gros, la Biélorussie semble occuper dans son groupe régional la même position médiane que la Suède dans le groupe occidental.

Il serait donc probablement tout aussi risqué d’affirmer que les résultats biélorusses démontrent l’inutilité du confinement en France que d’utiliser les résultats hongrois pour diffamer le « modèle suédois ». Il existe, de tout évidence, un ou plusieurs facteurs causaux ne dépendant ni de la longévité, ni des confinements, et qui doi(ven)t expliquer la persistance – en dépit de toutes les corrections imaginées jusqu’ici – de ce décalage Est-Ouest.

Mobilité transfrontalière ?

Restée en-dehors du champ de cette étude, la Grèce (de même que ses voisins Chypre et Malte) présente une étrange combinaison de longévité masculine importante (elle est de 79,6 ans en Grèce, comme en France) et de très basse mortalité spécifique au Covid-19 : aux alentours de 15/m.h. vers le 15 mai, soit 8 en données corrigées (facteur : -45%) : score presque égal à celui du champion régional slovaque – pays où la population masculine vit néanmoins 6,7 ans de moins en moyenne !

Dans ces trois pays, cependant, l’effet de fermetures de frontières relativement précoces (quoique – comme partout ailleurs en Europe – pas suffisamment pour empêcher l’apparition du virus) s’est probablement combiné à celui de l’insularité (qui caractérise le sud de la Grèce – et naturellement la totalité des États chypriote et maltais).

A l’inverse, certains États occidentaux sont désormais connus pour avoir longtemps résisté à l’idée d’une fermeture de leurs frontières (alors même qu’ils bouclaient consciencieusement leur propre population !). Les assez mauvais résultats de la France, seul État européen à avoir refusé jusqu’au bout de fermer ses frontières, pourraient être liés à ce refus.

Au stade actuel, néanmoins, ce n’est là qu’une hypothèse, dont la confirmation ou infirmation dépendra en grande partie des résultats de dépistages systématiques et aléatoires de la présence d’anticorps, permettant de mesurer après coup la prévalence réelle du virus dans les divers pays, et donc aussi de tester la validité des dates d’apparition officielles de premiers cas comme indicateurs de la chronologie réelle de l’épidémie. Et ce, notamment dans les pays (pour la plupart situés en Europe de l’est) où le Covid-19 est censé être arrivé tard. Néanmoins, compte tenu des conséquences politiques dévastatrices que pourrait avoir pour les gouvernements la découverte de hauts taux d’immunisation dans ces pays, d’ores et déjà gravement appauvris par le confinement, on est en droit de se demander si de tels dépistages seront conduits et/ou leurs résultats exploités et publiés dans de réelles conditions de transparence.

Habitudes médicamenteuses ?

À la fin de cette deuxième partie de l’étude, j’en reviens donc à l’hypothèse du prof. Raoult, formulée dans son entretien du 14 avril, et qui avait fourni l’impulsion initiale de ces études : le point sur lequel il insistait le plus étant en effet, non la longévité, mais les habitudes de consommation médicamenteuse.

En effet, parmi les conséquences habituelles de la richesse, on trouve aussi la suivante : les habitants des pays riches ont généralement les moyens (soit du fait de leurs revenus propres, soit grâce à des systèmes de mutualisation des frais de santé) de devenir les cibles du pushing pharmaceutique, et donc de consommer beaucoup de médicaments récents. Or les médicaments (vaccins compris) récents ont pour la plupart deux choses en commun :

  1. Être encore soumis à des droits intellectuels, ce qui motive leur pushing par les lobbyistes de Big Pharma, dont on a redécouvert l’influence politique démesurée à l’occasion de cette « crise du Covid », qui ont adultéré une grande partie de l’expertise médicale disponible, mais qui ont aussi recours à toutes les méthodes – efficaces – du marketing le plus classique.
  2. En dépit des autorisations de mise sur le marché qu’ils obtiennent (parfois du fait d’une expertise sous influence), ils ne sont souvent pas suffisamment éprouvés.

En d’autres termes : les citoyens des riches pays du Premier Monde sont non seulement typiquement ceux qui paient ce qu’il est convenu d’appeler le « progrès médical », mais aussi (souvent à leur insu) les cobayes de la recherche afférente, tandis que ceux des pays pauvres, accédant souvent aux substances à partir du moment où elles tombent dans le domaine public, paient non seulement un prix bien plus raisonnable, mais courent aussi moins de risques au passage.

L’un des éléments de la présente étude susceptible de plaider en faveur de cette hypothèse est l’assez haut niveau de mortalité corrigée constaté, en Europe de l’est, dans la population des pays dont beaucoup de citoyens passent le plus clair de l’année dans des pays occidentaux, où ils travaillent et vivent de facto – et notamment dans des pays où le bilan du Covid-19 a été assez lourd : c’est notamment le cas des roumains et des moldaves (25% et 30% de la population active, respectivement) travaillant par millions en Espagne et en Italie, mais aussi en France. Ces migrants du marché commun ont souvent accès aux structures de santé des pays d’accueil, et sont culturellement conditionnés à considérer toute innovation occidentale comme désirable (par opposition à l’héritage et aux pratiques « arriérés » de leur pays d’origine).

Inversement, le monde germanique, relativement épargné par les très fortes mortalités, a été, au cours des dernières décennies, à la faveur d’un écologisme croissant, le théâtre d’un vaste mouvement de méfiance vis-à-vis de la médecine chimique.

Il faut, néanmoins, remarquer au passage que cette dernière hypothèse remet partiellement en cause le postulat (uniformitariste) de départ : du fait (entre autres) d’habitude médicamenteuses divergentes, et en dépit de leur génétique très proche, il se pourrait, après tout, que les habitants de l’Europe actuelle présentent tout de même des différences géo-biologiques marquées. Et, contrairement à ce que pensent beaucoup d’européens de l’Est, il se pourrait que :

  • cette différence ne soit pas en faveur de l’Europe occidentale (et de ceux des « estiens » qui y ont élu domicile) ; et que
  • elle ne soit pas non plus liée à des politiques vaccinales héritées du communisme (bien au contraire).

Les points de vues exprimés dans cet article sont ceux de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement ceux de la Rédaction.