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Le PiS présente son programme pour l’après-pandémie

Temps de lecture : 4 minutes

Pologne – Certaines mauvaises langues affirment qu’il s’agit déjà d’un programme électoral, juste au cas où il faudrait convoquer des élections anticipées. Le nouveau programme de gouvernement présenté ce week-end à la convention nationale du parti Droit et Justice (PiS) a toutefois été signé par les alliés de sa coalition Droite Unie. Alors que les Polonais attendaient depuis plusieurs mois un « Nouvel Ordre » (Nowy Ład), c’est finalement un « Ordre polonais » (Polski Ład) qui leur a été présenté. Il s’agit en fait d’un grand programme de réformes que le gouvernement Morawiecki promet de mettre en œuvre au pas de charge.

Le premier ministre Mateusz Morawiecki a entamé une tournée de la Pologne cette semaine pour aller présenter partout le nouveau programme de son gouvernement. Son objectif ? « Rétablir l’ordre qui a été renversé par l’épidémie », assure-t-il. Il s’agirait cependant selon lui d’un « nouveau contrat social » que la coalition Droite unie propose aux Polonais. Avec ce programme, le premier ministre et les leaders du PiS revendiquent leur volonté de favoriser les familles à bas revenus :

« Il y a un très grand groupe de nos concitoyens qui ont du mal à boucler les fins de mois et pour qui il est difficile d’économiser. Le programme « Ordre polonais » est justement pour eux », a déclaré Mateusz Morawiecki.

« Plusieurs lois sont déjà prêtes », a-t-il assuré. En tout, il s’agit d’une centaine de projets de loi qui devront permettre la mise en œuvre de toutes les grandes réformes annoncées.

Ainsi, les réformes fiscales doivent entrer en vigueur dès le mois de janvier prochain. Côté baisses d’impôts : le relèvement du premier seuil d’imposition à 30.000 zlotys (env. 6.600 euros), en deçà duquel les Polonais ne paieront plus l’impôt sur le revenu. Le seuil au-delà duquel les revenus sont imposés au taux de 32 % au lieu de 17 % sera relevé et passera d’un peu plus 85.000 zlotys de revenus annuels à 120.000 zlotys. En revanche, l’assurance santé obligatoire ne sera plus déductible de l’assiette imposable.

D’après le journal Rzeczpospolita, le relèvement des seuils d’imposition coûtera environ 60 milliards de zlotys au budget tandis que la suppression de la possibilité de déduire les cotisations d’assurance santé lui rapportera dans les 35-40 milliards. En outre, les cotisations d’assurance santé que doivent payer les personnes en entreprise individuelle seront augmentées pour devenir proportionnelles à leurs revenus déclarés (comme pour les salariés), ce qui fait qu’une majorité de personnes travaillant à leur compte vont en réalité voir leurs impôts croître.

Plus généralement, la réforme fiscale annoncée par le PiS devrait bénéficier à ceux qui gagnent jusqu’à environ 7 000 zlotys (env. 1600 €) par mois mais nuire à ceux qui gagnent plus, mais qui sont moins nombreux.

Le « Nouvel Ordre » promis par le PiS prévoit aussi de supprimer le recours aux contrats de droit civil pour les relations de travail, qui permettent à la fois de se dédouaner du droit du travail et de réduire les cotisations sociales à verser.

Du point de vue de la concurrence loyale, les travailleurs européens ne peuvent que s’en réjouir,

d’autant qu’après son arrivé au pouvoir en 2015 le PiS avait déjà introduit un salaire horaire minimum applicable également à ces contrats de droit civil, et ce salaire horaire minimum est systématiquement relevé d’année en année depuis. En 2021, il est de 18,30 zlotys/heure (4,05 €) « brut », au sens polonais, c’est-à-dire avant prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu mais une fois amputé des cotisations sociales.

Sur le plan de l’action sociale, chère au PiS, le programme « Ordre polonais » présenté ce week-end prévoit d’accroître les dépenses de santé jusqu’à 7 % du PIB. Pour cela, le PiS se donne jusqu’à 2027, mais le seuil des 6 % du PIB devrait être atteint dès 2023, l’année des prochaines élections législatives si la coalition Droite unie tient le coup. Cet argent ne sera certainement pas de trop vu l’état du système public de santé en Pologne qui ressemble d’ailleurs à celui de ses voisins de l’ancien Bloc de l’Est.

En 2021, les dépenses prévues au budget pour le système de santé représentent 5,3 % du PIB. En 2015, dernière année des gouvernements de coalition des libéraux de la PO et du parti agraire PSL, c’était 4,44 % du PIB.

En 2019, dernière année avant la pandémie de Covid-19, c’était 4,86 %.

Le programme « Ordre polonais » prévoit encore de renforcer la politique pro-famille et nataliste du PiS, avec, en sus des allocations familiales déjà introduites par le gouvernement Szydło en 2016 (les premières allocations familiales en Pologne depuis la chute du communisme),

une subvention totale de 12.000 zlotys (env. 2.700 €) pour chaque enfant à partir du deuxième, versée en 12 ou 24 échéances, au choix, entre le 12e et le 36e mois après sa naissance.

Il y aura en outre un programme de garanties de l’État pour permettre aux moins riches d’obtenir des crédits pour l’achat d’un logement, et également un programme de construction d’appartements à bon marché. Outre la fiscalité et les politiques sociales, ce programme couvre également les investissements dans la numérisation, l’école, les infrastructures, l’agriculture, l’environnement, et les retraites.

Il porte en tout sur plus de 650 milliards de zlotys (145 milliards d’euros) de dépenses d’ici à 2030, ce qui représentera entre 3 et 4 % du PIB.

Il comporte certaines idées prises aux partis d’oppositions dont certains ont déjà annoncé qu’ils pourraient les soutenir puisque ce sont leurs propositions. Encore une manière adroite pour le PiS d’affaiblir l’opposition « totale » portée par la Plateforme civique (PO) depuis l’automne 2015.