Hongrie – Au vu de l’émoi qu’avaient suscité les résolutions somme toute très symboliques de collectivités territoriales polonaises se déclarant libres de toute idéologie LGBT, on pouvait assez logiquement s’attendre à ce que l’adoption de la loi anti-pédophiles hongroise interdisant la propagande LGBT à destination des mineurs – cibles privilégiées s’il en est ! – provoque un certain nombre de remous dans le Landerneau soi-disant progressiste. Et en effet, on entend déjà les cris d’orfraies tant à Berlin qu’à Bruxelles et ailleurs.
Une loi « contraire à nos valeurs »
Le ministre allemand des Affaires européennes, Michael Roth (SPD), – lui-même très officiellement marié avec un homme ! – a été l’un des premiers à réagir sur Twitter suite à l’adoption de la loi anti-pédophiles par le parlement hongrois :
« Cette loi est contraire à tout ce que nous considérons comme nos valeurs européennes communes », exprimant sa « Solidarité totale et [son] soutien aux personnes LGBTIQ en Hongrie ».
Même son de cloche de la part de son homologue français, Clément Beaune (LREM) – lui aussi personnellement très engagé sur les questions homosexuelles :
« Jusqu’à présent, il y a eu des problèmes avec l’état de droit en Hongrie, mais il est tout à fait nouveau qu’ils ciblent délibérément et directement un certain groupe de personnes, en l’occurrence les personnes LGBTQ.
[…] Il y a deux choses que vous pouvez faire à un moment comme celui-ci. L’une est la pression politique, car pour commencer quelque chose avec un problème, nous devons d’abord le nommer et en parler. L’autre est de soutenir directement les personnes ciblées contre les effets négatifs ».
L’ambassade des États-Unis à Budapest a fait savoir que « les gouvernements ont le devoir de promouvoir la liberté d’expression et de protéger les droits humains, y compris les droits de la communauté LGBTQI+ ».
Le commissaire européen Didier Reynders a déclaré regretter « profondément la nouvelle loi hongroise qui interdit la présentation de l’homosexualité aux mineurs. Lorsqu’elles construisent leur propre identité, les jeunes générations doivent avoir accès à des informations qui reflètent une société moderne et véritablement ouverte, dans toute sa diversité. Personne ne doit être censuré ».
Helena Dalli : « Bruxelles est prête à prendre des mesures »
Selon la logique habituelle de l’Union européenne, ces réactions négatives de l’establishment occidental pourraient fort bien se traduire par des sanctions à l’encontre des fauteurs de troubles que sont une fois encore les Hongrois. Le commissaire européen à l’égalité, la travailliste maltaise Helena Dalli, a tenu à rappeler que
« Bruxelles est prête à prendre [contre la Hongrie] des mesures [similaires à celles contre] les régions polonaises créant des zones sans LGBT. Le message est que si vous ne respectez pas les valeurs démocratiques ou égalitaires de l’Union européenne, vous n’avez pas le droit de collecter des fonds pour votre projet.
[…] L’Union européenne a [ainsi] suspendu il y a un an le financement des projets de jumelage soumis par six villes polonaises [qui se définissaient] comme ‘zones sans LGBT’. […] Nous pensons donc que si nous projetons cela sur ce qui se passe en Hongrie, cela pourrait avoir le même effet, mais l’UE examinera d’abord la légitimité d’une telle décision ».
Une tendance que soutient voire dicte par ailleurs manifestement Amnesty International :
« C’est un jour sombre pour les droits des LGBTI et pour la Hongrie.
Faisant écho à la tristement célèbre ‘loi sur la propagande’ russe, cette nouvelle législation stigmatisera davantage les personnes LGBTI […] Elle exposera les personnes déjà confrontées à un environnement hostile à une discrimination encore plus grande. […]
L’Union européenne et ses États membres doivent prendre des mesures urgentes en soulevant cette question lors de la prochaine réunion des affaires générales du Conseil et en veillant à ce que l’UE soit un lieu sûr pour les personnes LGBTI ».
Interrogé par la presse, le porte-parole de la Commission européenne, Christian Wigand, a déclaré : « La commission ne peut agir que dans sa propre compétence, nous devons d’abord examiner les points sur lesquels le droit hongrois est en conflit avec le droit de l’UE avant de tirer des conclusions ».
Von der Leyen : « Nous sommes très inquiets à propos de la nouvelle loi hongroise »
La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, n’est d’ailleurs pas en reste pour condamner la Hongrie – dans ce domaine comme dans d’autres :
« Nous sommes très inquiets à propos de la nouvelle loi hongroise. Nous examinerons si cela enfreint la législation européenne en vigueur.
Je crois en une Europe qui accepte la diversité, pas une qui la cache à nos enfants. Personne ne devrait être discriminé sur la base de son orientation sexuelle ».
Zoltán Kovács : « Au lieu de mener les batailles de l’idéologie du genre, nous nous concentrons sur les choses importantes »
Le porte-parole du gouvernement hongrois, Zoltán Kovács, lui a répondu, également via Twitter : « En tant que mère de sept enfants, vous comprenez sûrement l’importance de pouvoir éduquer vos enfants sur ces questions sensibles comme bon vous semble […] C’est l’objet de cette loi, de même que la création de graves conséquences pénales pour des actes de pédophilie […] En tant que démocrate-chrétien, avec quelle partie de ce qui précède avez-vous un problème ? ».
« Au lieu de mener les batailles de l’idéologie du genre, nous nous concentrons sur les choses importantes : la protection et le développement sain des enfants en Hongrie
et la préservation du droit des parents d’éduquer leurs enfants sur ces questions sensibles », a-t-il expliqué à ce sujet sur son blog About Hungary.