Union européenne – Il n’est pas passé inaperçu que l’Union européenne envisage de recourir au désormais fameux « article 7 » du traité de Lisbonne envers la Hongrie, suspendant son droit de vote. En parallèle, la Pologne et l’Autriche ont également reçu des menaces sérieuses de sanctions pour leur refus catégorique des quotas de migrants.
« Si rien n’est fait avant notre prochain rapport en juin, la Commission n’hésitera pas à utiliser ses pouvoirs en vertu des traités et à ouvrir des procédures d’infraction », a déclaré le commissaire aux Migrations, Dimitris Avramopoulos, lors d’une conférence de presse au Parlement européen à Strasbourg, à la mi-mai. Dans une résolution adoptée à Strasbourg par 393 voix pour, 221 contre et 64 abstentions, les eurodéputés ont estimé que la situation actuelle en Hongrie présentait « un risque clair de violation grave » des valeurs fondamentales de l’Union, ce qui selon eux « justifie le lancement de la procédure » prévu à l’article 7 du Traité de Lisbonne.
Cette disposition – qui n’a encore jamais été utilisée – peut déboucher sur la suspension des droits de vote de la Hongrie au sein du Conseil européen, qui réunit les États membres de l’Union européenne. Selon les initiateurs de la résolution, le « régime de Viktor Orbán » présente « une grave détérioration de l’État de droit, de la démocratie et des droits fondamentaux ces dernières années » en particulier en ce qui concerne « la liberté d’expression », « l’indépendance du pouvoir judiciaire » et « les droits fondamentaux des migrants ».
Côté hongrois, on explique que les réseaux Soros contre-attaquent suite aux mesures et projets du gouvernement hongrois à l’égard des ONG et de la CEU de George Soros. Les membres du PPE, le parti européen dont Orbán et son parti, le Fidesz, sont membres, ont par ailleurs majoritairement voté en faveur de cette résolution, malgré la rencontre récente entre Viktor Orbán et le président du PPE afin de rassurer les eurodéputés.
La Pologne et l’Autriche également dans le collimateur, la Tchéquie et la Slovaquie sous surveillance
« Accepter des migrants provoquerait plus de dégâts à la Pologne que d’éventuelles sanctions de l’UE, » a déclaré le ministre polonais de l’Intérieur, Mariusz Błaszczak, en réaction aux propos du commissaire européen. Le gouvernement centriste et européiste de la Pologne avait accepté les quotas de migrants en septembre 2015, mais moins de deux mois plus tard, le nouveau gouvernement conservateur PiS s’y est opposé, conformément aux attentes de la majorité des Polonais, et s’y tient, épaulant la Hongrie en particulier dans son opposition au pouvoir central européen.
L’Autriche, en pleine crise politique en partie provoquée par la crise des migrants, voit l’ascension du jeune Sebastian Kurz, figure montante du conservatisme autrichien, et les attaques de Bruxelles contre ce pays ayant fait volte-face sur la question des migrants il y a un an, pourrait bien profiter aux conservateurs menés par Kurz ainsi qu’au parti national-libéral FPÖ, qui pourraient gouverner ensemble suite aux prochaines élections parlementaires prévues pour l’an prochain, mais qui pourraient être avancées à cet automne. Le rapprochement avec la Hongrie de Viktor Orbán et plus généralement avec le groupe de Visegrád est un thème déjà abordé et qui semble probable.
Enfin, la Tchéquie et la Slovaquie échappent pour le moment à cette volée de bois vert pour avoir accepter quelques migrants, alors que la Hongrie et la Pologne n’en n’ont accepté aucun dans le cadre des quotas de redistribution. Cependant, en Slovaquie, le nombre de migrants acceptés est en dessous des 800 prévus et en Tchéquie, il est de 12.
Une rupture de plus en plus perceptible
La question migratoire et le Brexit auront cristallisé les disparités profondes d’intérêts, d’objectifs et de plans pour l’UE des membres occidentaux et centraux. Avec l’élection de l’européiste radical Emmanuel Macron en France, et la probable réélection d’Angela Merkel cet automne en Allemagne, l’Union européenne est en voie de se rompre. L’article publié sur Le Monde prouve la volonté très forte et ouvertement assumée de conduire une politique européenne à deux vitesses, qui rejette les projets d’intégration des pays d’Europe centrale. Le Collectif signataire de cet article insiste : « Il faut abandonner l’illusion que tous les Etats membres pourront trouver un niveau d’intégration homogène » et appelle « à recourir à des accords ou à des traités ad hoc à l’extérieur du cadre de l’UE » afin de mener à bien la politique germano-française.